Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
de mes rêves... à mes ailes...
de mes rêves... à mes ailes...
Publicité
Newsletter
Albums Photos
Derniers commentaires
Archives
20 février 2002

salon

Vers le quinze août je commençai à perdre l'appétit sans m'en apercevoir.  On me vit me coucher de plus en plus tard et me lever de plus en plus tôt.

 

Mais dès notre arrivée en juillet, je réquisitionnai une chambre voisine à la mienne encore vide, bloquant sa porte en position ouverte pour y installer une barre en travers où je m'exerçai aux tractions. De même je réussis à fixer (avec force acrobaties sur le toit, sous les hurlements de désapprobation des mères et grand-mère qui forcèrent un Richard ravi, à m'y suivre.)  une corde à l'endroit le plus avancé du toit du chalet ce qui me donnait une douzaine de mètres pour m'exercer au grimpé. Pour intensifier l'entraînement les filles se firent un plaisir à me servir de coach et à me chronométrer. Je n'avais pas rendu mes randgers à l'école en juin, Richard le ferait pour moi en septembre; et une fois sur deux, je troquai mes baskets pour eux lors de mes joggings matinaux. Je voulais arriver à Salon au top de ma forme. Si les hommes et les filles me soutenaient et m'encourageaient, Gisou soutenue par Mamie et Sylvie faisaient tout pour que au contraire, je me pose, me repose et me calme me voyant dans un état de nefs et d'anxiété qui s'intensifiait de jour en jour au fur et à mesure que l'on s'approchait de la fin du mois d'Août.

L'heure du retour sur Aix arriva. Gisou tint à quitter les Alpes une semaine avant la fin du mois pour que je puisse me préparer plus calmement à la rentrée. Et puis Véronique de son côté partait en internat pour devenir institutrice. Elle aussi angoissait mais moins que moi. Elle n'avait jamais été interne, ni loin de sa famille sauf pour de cours laps de temps comme lors de séjours de langue, de classe verte lorsqu'elle était plus petite dont elle avait gardé de très mauvais souvenirs d'ailleurs. Et encore elle pourrait rentrer tous les week-end contrairement à moi. Nous passâmes de longues nuits à parler tous les deux. La corde passait juste devant leur fenêtre et celle du second à distance d'un bras.

Ce que je trouvai de remarquable c'est que deux ans auparavant, lorsque j'étais venu à Aix, je l'avais fait sans angoisse, même excité de découvrir des lieux et une vie  inconnue, seul loin de ma famille. Et là, alors que j'avais vieilli, mûri, pris de la bouteille, j'étais bouffé par une peur terrible de cette inconnue qui m'attendait là-bas à Salon.  En plus contrairement à beaucoup d'autres cette vie militaire avec toutes ses contraintes je la connaissais bien et j'avais appris à la supporter si ce n'était peut-être même à l'apprécier dans sa rigueur. Peut-être parce que aujourd'hui, même si je ne vivais pas exactement avec eux, j'angoissais de m'éloigner de ceux que j'aimais et qui me le rendaient bien.

Contrairement à celui de Véronique mon sac était plus petit et plus simple à faire. Gisou m'en avait même acheté un rien que pour cette occasion qu'elle avait rempli toute seule selon la liste officielle que j'avais reçue avec mon dossier d'inscription:

- linge de corps, sous-vêtements (2 semaines d’autonomie environ),

- lessive (lavage à la main),

- serviettes de toilette,

- serviette de bain,

- nécessaire de toilette pour deux mois : savon, gel douche, shampooing, brosse à

dents, dentifrice, mousse à raser, rasoirs manuels,

- une paire de chaussures de sport de bonne qualité,

- plusieurs paires de chaussettes de sport,

- maillot de piscine, lunettes et bonnet,

- stylos “bic” noirs,

- un cadenas,

- une lampe frontale avec des piles de rechange,

- lunettes de vue (recommandées y compris pour les porteurs de lentilles de contact),

  • - une montre s’éclairant la nuit,

  • une boussole type “  course d’orientation “ (conseillé)

Une trousse de pharmacie :

- Elastoplast et pansements (plusieurs boites),

- Compeed (pansements anti-ampoules) en quantité non négligeable,

- Désinfectant (éosine 60 ml) + coton.

À laquelle elle ajouta du paracétamol (une si grande quantité que je crus d'abord qu'elle voulait que je puisse en distribuer.) et du Spasfon pour le mal de ventre et un médicament homéopathique contre une éventuelle gastro.

En rigolant Richard lui demanda si elle n'oubliait pas quelque chose pour la grippe, la malaria et la dingue et elle me rajouta deux boîtes de mouchoirs en papiers vidées et rangées soigneusement dans un emballage tissu qu'elle cousit elle-même et deux sachets de bonbons au miel et au propolis.

Vu que ses rajouts n'étaient pas sur la liste des choses autorisées je me mis en plus à angoisser de me faire cranter1 pour ça mais Richard me rassura en me disant que cela passerait sans problème. Maintenant voyant tout ce qu'elle avait pu mettre dans LES sacs de Véro j'étais content qu'elle ne puisse pas faire pareil avec le mien.

Chaque soir je ne pouvais m'empêcher de vérifier et de revérifier que j'avais bien aussi tous les papiers demandés, tellement que au bout de deux jours, Richard me les récupéra pour les garder dans sa chambre hors de ma portée. Ces deux jours furent d'ailleurs terribles, je crus que j'allais devenir fou, je tournais en rond dans l'appartement lorsque je n'étais pas en-bas dans la cours du lycée pour courir ou mettre des paniers de basket pendant des heures.

Il nous fallait être à dix-huit heures à Salon, Richard prévoyait un départ vers quinze heures histoire, de me rassurer, même s'il ne fallait normalement pas plus d'une demi-heure pour faire le trajet Aix-Salon, mais on ne savait jamais, nous pouvions crever.

Isabelle était descendue avec nous histoire de garder ses soeurs pendant que ses parents et Véronique m'accompagneraient.

La veille du jour J, le coucher se fit officiellement à vingt et une heures, il fallait que je sois en forme, après un repas léger avec compote de pommes à la cannelle et tisane calmante. À vingt-trois heures je fis arriver Gisou avec un bol de lait chaud au miel de tilleul.

_ “Tiens bois ça, cela t'aidera peut-être à dormir.

_ “Alors là, j'en serais bien étonné! “

Une demie-heure plus tard, elle revenait.

_ “Tu ne dors toujours pas?

_ “Bin non, faut croire. Et toi non plus d'ailleurs. Ne me dis pas que tu angoisses aussi?

_ “Mais non! Qu'est-ce que tu vas inventer? Pousse-toi, fais-moi une petite place. C'est Richard qui m'empêche de dormir, il ronfle.“

Je souris, si moi je ne savais pas mentir, alors elle aurait pu être réellement ma mère!

Elle me piqua tous les oreillers et me força à coucher dans ses bras, dos à elle. Je faisais un bond dans le passé, presque deux ans plus tôt lors de mon premier séjour au chalet. J'étais bien et c'est vrai que sa présence tendre me calmait, je fermai les yeux et me laissai bercer par ses paroles. Elle me parla d'elle petite. De son adolescence où ses parents à cause de la guerre la mirent en pension avec sa soeur et son frère à la campagne chez leurs grand-parents, son père étant parti puis prisonnier de guerre. Je m'endormis rêvant de petites filles blondes.

Nous arrivâmes à dix-sept heures aux abords de la base. Je n'aurais pas du déjeuner, je forçai Richard à s'arrêter pour vomir deux fois. Gisou était morte d'inquiétude, j'allais y arriver malade!

Nous n'étions pas les seuls à être là largement en avance et certains semblaient aussi anxieux que moi. À dix-sept heures trente nous pûmes entrer sur la place principale de l'école où j'eus la surprise de voir Mamie et Papy ainsi que Rémy, Sylvie et leurs filles nous rejoindre.

Je les quittai rapidement pour rejoindre Claude et Maxime. A leur contact l'angoisse me quitta, finalement je n'échangeai qu'une école pour une autre, un cadre militaire pour un autre. Et c'est rassurés de me voir blaguer et rire  qu'ils me regardèrent m'éloigner mon sac sur l'épaule.

 

1punir

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité