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de mes rêves... à mes ailes...
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27 octobre 2000

Le père Vincent

Aujourd’hui j’ai 17 ans. Je peine à y croire. Pour une fois il fait beau mais de plus en plus froid. Je suis de plus en plus sûre d’avoir fait une connerie en me coupant les cheveux, au moins je n’aurais pas froid à la nuque. Dan est gentil avec moi, il m’a trouvé un super manteau bien chaud et bien long, par contre les randgers sont trop grandes mais l’avantage c’est que j’ai pu enfiler quatre paires de chaussettes sans problème dans la cabine d’essayage avant hier.

Je me suis assise dans un coin de l’église, depuis juillet je n’avais plus mis les pieds dans ce genre de bâtiments. Il y fait plus chaud que dehors. Il n’y a pas de vent, une bonne chose que je commence à apprécier. La messe commence, il y a des servants, ils sont tous blonds. Ils les choisissent ma parole. Et le mien, est-il vraiment mort? En tout cas celui que je porte, il ne le sera jamais.

La messe est finie depuis longtemps, je n’ai pas envie de sortir, j’ai sommeil. je suis assise, plus ou moins à genoux, la tête appuyée sur mes mains sur le banc de devant, on pourrait croire que je prie. J’aime bien l’odeur de l’encens, ça sent meilleur que moi ces derniers temps. Plusieurs fois j’ai senti la présence de vieilles autour de moi, à leur voix. Aperçues des chaussures, petites, noires, vernies ou bien cirées. Elles n’osent pas m’aborder, je leur fait peur. Elle peuvent! Je suis la pire des pécheresse mais je porte ma croix au fond de moi avec bonheur.  Cette fois ce sont des pieds d’hommes.

_”Mademoiselle, nous nous excusons, nous devons fermer les portes de l’église.”  Déjà? Mais quelle heure peut-il être?

Aurais-je réellement dormi? “Vous pourrez revenir autant que vous voudrez.”

Je lève la tête et regarde l’homme qui me parle, c’est le curé, je le reconnais malgré ses vêtement civil. Le notre celui de Munster ne quittait jamais sa soutane noire, je l’appelais le corbeau. Il s’entendait bien avec le père de Robert.

Il me tend la main, je la prend. Il doit avoir à peine la trentaine, il a des yeux verts magnifiques et un sourire qui vous donnerait presque envie d’y croire. Je sors, je ne sais pas où aller. Je fouille mes poche, j’ai deux francs en petite monnaie, même pas de quoi m’acheter du pain. Ils ont fermé la porte de l’église, au lieu de dormir j’aurais du sortir avant eux et faire la manche, j’aurais peut-être eu assez pour manger. Je cours, je le rattrape, il s’est retourné.

_”Pardon mon père, vous n’auriez pas cinq francs pour que je m’achète à manger?

_”Depuis quand n’as-tu pas mangé?

_”Hier.

_”Viens avec moi, je vais chez des paroissiens, tu seras mon invitée.”

L’appartement est petit mais coquet et il y fait chaud. La jeune femme fait une drôle de tête en me voyant mais prend mon manteau sans rien dire. Ils ont trois petits enfants de moins de six ans. C’est la plus grande qui dit le bénédicité. Même le bébé qui doit avoir plus de six mois est sage. Je le dévore des yeux, bientôt j’en aurais un comme lui.

Le repas était bon. Michelle puisqu’elle s’appelle comme ça, j’invite à la suivre.

_”Tiens profites-en lave-toi, je vais voir si je n’ai pas des sous-vêtements à te donner. Mais honnêtement, tu as quel âge?

_”Dix-sept ans aujourd’hui.

_”Bon ce ne sont pas mes oignons mais pour le bébé tu devrais retourner chez tes parents.

_”Ils veulent que j’avorte et je ne veux pas. C’est la seule chose qui me reste de son père qui est mort.”

Moi qui croyais que ma grossesse ne se voyait pas encore, et flûte!

Cela me fait du bien de me laver mais je ne leur fais pas totalement confiance, je me dépêche. Ah le bonheur d’avoir une culotte propre. Je ne mets pas le soutien-gorge, je le revendrai, il me rapportera un peu de sous.

Le père Vincent m’accueille avec le sourire. Il va partir, me propose de venir chez lui pour parler. J’accepte. Elle me donne un sac en papier avec quelques vêtements et de la nourriture.

Le soir je retrouve Dan et les autres. Pour une fois notre repas ne sera pas composé que de bière. Je distribue les fringues aux autres filles. Ce soir là je vais m’endormir en pensant à ce qu’elle m’a dit: ils ne peuvent plus me forcer à avorter.

Le lendemain soir Tante Émilie se mettra à pleurer en refermant sa porte derrière moi.

Ln des Landes.

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